Violences conjugales / Droit à la vie / Arrêt de la CEDH (Leb 765)

Saisie d’une requête dirigée contre la Turquie, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 23 février dernier, l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à la vie (Civek c. Turquie, n°55354/11). Les requérantes, ressortissantes turques, sont les filles d’une victime de violences conjugales, leur père ayant assassiné leur mère en dépit des mesures de protection et de plusieurs plaintes déposées par celle-ci, faisant, notamment, état des menaces de mort qu’il avait émis à son encontre. Les requérantes reprochaient aux autorités turques de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour empêcher la mort de leur mère. La Cour rappelle que l’article 2 de la Convention implique le devoir d’assurer le droit à la vie mais, également, dans certaines circonstances, l’obligation positive de prendre des mesures préventives pour protéger un individu dont la vie est menacée. Cette obligation positive s’impose lorsque les autorités savaient ou auraient dû savoir qu’il existait une menace réelle et immédiate contre un individu, du fait des actes criminels d’un tiers, et qu’elles n’ont pas pris les mesures, auxquelles l’on pouvait raisonnablement s’attendre, pour pallier ce risque. La Cour retient, tout d’abord, que les rapports difficiles entre les époux étaient connus des forces de l’ordre et que la menace réelle était constituée par les plaintes déposées par l’épouse, faisant état des menaces de mort émises contre elle par son mari. La Cour cherche, ensuite, à savoir si les autorités ont fait ce que l’on pouvait raisonnablement attendre d’elles pour empêcher la matérialisation de cette menace et si des mesures ont bien été prises au début de l’affaire. La Cour estime qu’après la libération de prison de l’époux, les autorités n’ont pas pris de mesures supplémentaires concrètes pour protéger la mère des requérantes et ce, en dépit de 2 nouvelles plaintes déposées par cette dernière. La Cour observe, notamment, que le procureur aurait pu procéder à l’arrestation de l’époux. Partant, la Cour conclut à la violation de l’article 2 de la Convention. (CG)

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