Les obstacles législatifs, administratifs et financiers à la mise en œuvre de dispositions nationales prévoyant l’octroi de soins médicaux à des détenus en situation de vulnérabilité entrainent une violation de la Convention (24 juin)
Benyukh c. Ukraine, requête n°39150/20
Le requérant est un détenu ukrainien souffrant de graves pathologies bucco-dentaires et gastriques ayant nécessité le retrait de la quasi-totalité de ses dents, sans toutefois avoir pu bénéficier, durant 19 mois, du régime de soins gratuits prévu par le droit national sur les soins aux prisonniers, nécessaires pour traiter ses infections. Ce dernier soutient qu’il ne pouvait plus mâcher correctement et que son élocution et son visage ont été affectés, lui causant des souffrances et un sentiment d’humiliation. Il allègue une violation des articles 3 et 13 de la Convention. La Cour EDH estime qu’en dépit de l’existence d’un cadre législatif national prévoyant la fourniture de soins gratuits à des détenus vulnérables ne disposant pas de moyens financiers suffisants et, d’obligations découlant du devoir de vigilance incombant à l’Etat à l’égard des détenus, le requérant a été privé de leur effet utile en raison d’obstacles législatifs, administratifs et financiers. Elle souligne que l’obtention in fine par le requérant d’une prothèse financée et posée par une organisation non gouvernementale (« ONG ») ne saurait conduire à la conclusion que l’Etat a rempli ses obligations de vigilance, dans la mesure où les traitements ont été réalisés à l’initiative de l’ONG et à ses frais, sans que les autorités nationales n’aient joué un rôle dans la procédure. Constatant qu’il n’existe aucune raison de douter des souffrances engendrées du fait de sa condition médicale, aggravée par l’absence, en temps utile, de traitement dentaire, la Cour EDH conclut à la violation des articles 3 et 13 de la Convention. (BM)