Protection des consommateurs / Contrats de crédit / Solvabilité de l’emprunteur / Obligation de vérification précontractuelle / Déchéance du droit aux intérêts conventionnels / Arrêt de la Cour (Leb 704)

Saisie d’un renvoi préjudiciel par le tribunal d’instance d’Orléans (France), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 27 mars dernier, l’article 23 de la directive 2008/48/CE concernant les contrats de crédit aux consommateurs (Le Crédit Lyonnais, aff. C-565/12). Le litige au principal opposait la société LCL Le Crédit Lyonnais (« LCL ») à un particulier au sujet d’une demande de paiement de sommes restant dues sur un prêt personnel que cette société lui avait accordé et pour lequel il est en défaut de paiement. LCL n’ayant pas rempli son obligation précontractuelle de vérification de sa solvabilité, elle s’est vue opposer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels. Toutefois, la juridiction de renvoi relève que LCL pourra toujours bénéficier des intérêts au taux légal, qui restent supérieurs aux intérêts conventionnels. Elle a donc interrogé la Cour sur le point de savoir si le régime de sanction français est compatible avec le droit de l’Union, qui prévoit, entre autres, que les sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales en matière de vérification précontractuelle de la solvabilité de l’emprunteur doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. La Cour expose, en premier lieu, que le prêteur est tenu, avant toute relation contractuelle, de vérifier la solvabilité de l’emprunteur, à charge pour les Etats membres de prévoir des mesures effectives, proportionnées et dissuasives pour sanctionner tout manquement à cette obligation. La Cour examine donc si la rigueur de la sanction prévue par la réglementation française est en adéquation avec la gravité de la violation qu’elle réprime et, en particulier, si elle comporte un effet réellement dissuasif. La Cour estime que, dans le cas où le capital restant est immédiatement exigible en raison de la défaillance de l’emprunteur, la juridiction de renvoi doit comparer les montants que le prêteur aurait perçus dans l’hypothèse où il aurait respecté son obligation d’évaluation précontractuelle avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction précitée. Si la juridiction de renvoi devait constater que l’application de la sanction est susceptible de conférer un bénéfice au prêteur, il en découlerait que le régime de sanction en cause n’assurerait pas un effet réellement dissuasif. La Cour précise que la sanction en cause ne saurait être considérée comme réellement dissuasive si les montants susceptibles d’être perçus par le prêteur suite à l’application de la sanction ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier en cas de respect de son obligation. Si la sanction de la déchéance des intérêts se trouvait affaiblie voire purement et simplement annihilée, la sanction ne présenterait pas un caractère véritablement dissuasif et violerait les dispositions de la directive. (CK)

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