Politique étrangère et de sécurité commune / Compétence de la Cour / Arrêt de la Cour (Leb 800)

Saisie d’un renvoi préjudiciel par la High Court of Justice (Royaume-Uni), la Cour de justice de l’Union européenne a, notamment, interprété, le 28 mars dernier, les articles 19, 24 et 40 TUE, 275 TFUE et 40 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (Rosneft, aff. C-72/15). Dans l’affaire au principal, le Conseil de l’Union européenne a établi au cours de l’année 2014 une série de mesures restrictives en réaction aux actions de la Russie considérées comme déstabilisant la situation en Ukraine. Rosneft, une société immatriculée en Russie, spécialisée dans les secteurs du pétrole et du gaz, détenue en majorité par un organisme détenu lui-même par l’Etat russe, est visée par les mesures restrictives et a introduit des recours contre celles-ci devant le juge de l’Union et devant le juge national. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir, d’une part, si les actes litigieux dont la décision 2014/512/PESC concernant des mesures restrictives eu égard aux actions de la Russie déstabilisant la situation en Ukraine sont valides et, d’autre part, quelle est l’interprétation à donner à ces textes. Elle avait émis des doutes sur leur interprétation dans la mesure où, au cours de la procédure, elle a constaté des divergences dans la pratique des autorités d’autres Etats membres pour l’interprétation de certaines dispositions. La Cour s’est, notamment, penchée sur la question de sa compétence pour apprécier la validité des actes en cause dans le cadre d’un renvoi préjudiciel. Elle rappelle que, si elle n’est pas en principe compétente en ce qui concerne les dispositions relatives à la Politique étrangère et de sécurité commune (« PESC ») ainsi que les actes adoptés sur le fondement de ces dispositions, il existe 2 exceptions à ce principe. D’une part, la Cour se reconnaît compétente pour statuer sur une demande de décision préjudicielle portant sur la compatibilité de la décision 2014/512/PESC avec l’article 40 TUE. D’autre part, considérant que le contrôle de légalité des actes de l’Union repose sur 2 procédures juridictionnelles complémentaires, la Cour rappelle que le renvoi préjudiciel en appréciation de validité remplit une fonction essentielle pour assurer la protection juridictionnelle effective des citoyens européens. Selon elle, si l’article 47 de la Charte ne peut créer une compétence de la Cour lorsque les traités l’excluent, ce principe implique, toutefois, que l’exclusion de la compétence de la Cour en matière de PESC soit interprétée de manière restrictive. Ainsi, il convient de considérer que les articles 19, 24 et 40 TUE, 275 TFUE ainsi que l’article 47 de la Charte doivent être interprétés en ce sens que la Cour est compétente pour statuer à titre préjudiciel, en vertu de l’article 267 TFUE, sur la validité d’un acte adopté sur le fondement des dispositions relatives à la PESC telles que la décision 2014/512/PESC, pour autant que la demande de décision préjudicielle porte soit sur le contrôle du respect de l’article 40 TUE, soit sur le contrôle de la légalité des mesures restrictives à l’encontre des personnes physiques ou morales. (JJ)

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