Peine d’emprisonnement / Détenu en fin de vie / Interdiction des traitements inhumains ou dégradants / Arrêt de la Grande Chambre de la CEDH (Leb 823)

Saisie d’une requête dirigée contre la Roumanie, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 28 novembre dernier, l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatif à l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants (Dorneanu c. Roumanie, requête n°55089/13). Le requérant, ressortissant roumain, a été condamné à une peine d’incarcération de 3 ans alors qu’il souffrait d’un cancer en phase terminale et qu’il faisait l’objet de traitements lourds en hôpital. Il a été transféré à l’hôpital de la prison après que sa demande tendant à interrompre l’exécution de sa peine pour une période de 3 mois afin de poursuivre sa chimiothérapie a été refusée et il y est décédé. Devant la Cour, le requérant, ainsi que son fils, qui a poursuivi l’instance suite à son décès, invoquait, notamment, que son incarcération était incompatible avec son état de santé et était constitutive d’un traitement inhumain et dégradant. La Cour rappelle que pour déterminer si la détention d’une personne malade est conforme à l’article 3 de la Convention, 3 éléments doivent être pris en compte. Elle s’intéresse, tout d’abord, à l’état de santé de l’intéressé et à l’effet des modalités d’exécution de sa détention sur son évolution, qui ne peuvent en aucun cas le soumettre à des sentiments d’angoisse et d’infériorité propres à briser sa résistance physique et morale. En l’espèce, elle constate que la taille de la cellule du requérant n’était pas adaptée à son handicap et que les 17 transferts d’un établissement pénitentiaire à un autre dont il avait fait l’objet l’ont soumis à une épreuve d’une intensité excédant le niveau inévitable de souffrance inhérent à la détention. Ensuite, la Cour prend en considération le caractère adéquat des soins dispensés en détention. Elle relève que rien dans le dossier ne permet de supposer que le requérant ait bénéficié de conseils psychologiques adéquats et qu’au fur et à mesure que sa maladie progressait, le requérant ne pouvait plus y faire face en milieu carcéral. Enfin, elle s’intéresse à l’opportunité du maintien en détention de l’intéressé compte-tenu de son état de santé et note que les juridictions nationales n’ont avancé aucun motif lié à l’éventuelle menace pour la protection sociale que la remise en liberté du requérant aurait pu présenter. Partant, la Cour conclut à la violation de l’article 3 de la Convention. (AT)

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