Organisme de radiodiffusion télévisuelle / Retransmission exclusive / Accès au signal satellitaire / Droit de propriété / Liberté d’entreprise / Arrêt de la Cour

Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Bundeskommunikationssenat (Autriche), la Cour de justice de l’Union européenne a apprécié, le 22 janvier dernier, la validité de l’article 15 §6 de la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (Sky Österreich, aff. C-283/11). L’article 15 §6 de la directive prévoit que tout organisme de radiodiffusion télévisuelle peut avoir accès à des évènements d’un grand intérêt pour le public retransmis exclusivement par un autre organisme aux fins de la réalisation de brefs reportages d’actualité, sans que la compensation financière prévue ne soit supérieure aux frais supplémentaires directement occasionnés par la fourniture de l’accès au signal satellitaire. Le litige au principal opposait une chaîne de télédiffusion par satellite (Sky) à l’organisme public de radiodiffusion autrichien (ORF), au sujet des conditions financières conclues depuis 2009 selon lesquelles ORF était en droit d’obtenir un accès audit signal satellitaire concernant des matchs de football sur lesquels Sky détenait des droits exclusifs de radiodiffusion, moyennant une compensation de 700 euros par minute diffusée. En effet, Sky estimait que, malgré l’entrée en vigueur de la directive en 2010, elle pouvait se prévaloir d’un droit contractuellement acquis à exercer de manière autonome son droit de retransmission et a invoqué une violation de son droit de propriété sur lesdits extraits et de la liberté d’entreprise. La juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur la validité de l’article 15 §6 de la directive au regard de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Concernant le droit de propriété, la Cour considère que les garanties conférées par la Charte s’étendent aux droits exclusifs de radiodiffusion télévisuelle acquis par voie contractuelle. Toutefois, elle rappelle que le droit de l’Union prévoyait, depuis 2007, un droit pour les organisme de radiodiffusion télévisuelle de réaliser de brefs reportages tout en limitant la compensation financière due. Dès lors,  Sky ne pouvant se prévaloir d’une position juridique acquise avant l’entrée en vigueur de la directive de 2010 et permettant un exercice autonome de son droit exclusif de retransmission, la protection de la propriété ne saurait être invoquée. Concernant la liberté d’entreprise, la Cour constate que l’article 15 §6 de la directive constitue une ingérence dans la liberté d’entreprise des titulaires de droits exclusifs de radiodiffusion télévisuelle en ce qu’il les empêche, notamment, de décider librement du prix auquel ils fournissent l’accès à leur signal. Cependant, la Cour considère que cette limitation poursuit un objectif d’intérêt général en ce qu’elle vise à sauvegarder la liberté fondamentale de recevoir des informations et à promouvoir le pluralisme. Soulignant qu’une telle limitation est apte et nécessaire à protéger cet intérêt général, la Cour estime que la réglementation litigieuse respecte le principe de proportionnalité dans la mesure où elle instaure un juste équilibre entre les différents droits et libertés fondamentaux en cause. Dès lors la Cour conclut à la validité de l’article 15 §6 de la directive. (SC)

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