Magistrat / Sanction disciplinaire / Droit à un tribunal / Droit au respect de la vie privée et familiale / Droit à la liberté d’expression / Arrêt de la CEDH (Leb 941)

L’infliction d’une sanction disciplinaire à un magistrat en raison de déclarations faites aux médias sur la base de renseignements obtenus par le biais de sa mise sur écoute téléphonique, sans possibilité de recours juridictionnel, a entraîné la violation des articles 6, 8 et 10 de la Convention (9 mars)

Arrêt Eminağaoğlu c. Turquie, requête n°76521/12

Après avoir écarté l’inapplicabilité de l’article 6 §1 de la Convention, la Cour EDH relève l’absence de garanties procédurales concernant la procédure menée devant le Conseil supérieur des juges et des procureurs qui a infligé la sanction disciplinaire. Ainsi, celui-ci ne saurait être qualifié de tribunal. Or, la procédure n’a pas fait l’objet d’un contrôle ultérieur par un organe judiciaire de pleine juridiction conformément aux garanties prévues par l’article 6, et ce, sans qu’aucun motif ne soit invoqué pour justifier l’exclusion d’un tel contrôle juridictionnel. La Cour EDH ajoute que l’utilisation, dans le cadre de l’enquête disciplinaire, de renseignements obtenus par le biais de la mise sur écoute téléphonique du requérant au cours d’une enquête pénale constitue une ingérence à l’article 8 de la Convention non prévue par la loi. En outre, le processus décisionnel était très lacunaire et n’offrait pas les garanties indispensables au statut de magistrat du requérant. Dès lors, les restrictions à son droit à la liberté d’expression que constituent l’enquête disciplinaire et la sanction disciplinaire qui lui a été infligée ne s’accompagnaient pas de garanties effectives et adéquates contre les abus. Partant, la Cour EDH conclut à la violation des articles 6 §1, 8 et 10 de la Convention. (PLB)

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