France / Personne détenue / Droit à être entendu par un magistrat / Arrêt de la CEDH

La Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France, le 23 novembre dernier, pour violation de l’article 5 §3 de la Convention EDH relatif au droit d’une personne arrêtée ou détenue d’être traduite devant un juge habilité à exercer des fonctions judiciaires, à être jugée dans un délai raisonnable ou à être libérée pendant la procédure (Moulin / France, requête n°37104/06). La requérante, avocate en France, avait été mise en cause dans une affaire de trafic de stupéfiants et placée en garde à vue. A la fin de la garde à vue, la requérante avait été présentée au procureur qui ordonna sa conduite en maison d’arrêt avant son transfèrement devant le juge d’instruction qui eu lieu cinq jours après son arrestation. Invoquant l’article 5 §3, la requérante se plaignait de ne pas avoir été aussitôt traduite devant un juge judiciaire après son arrestation. La Cour examine si la présentation de la requérante au procureur deux jours après son arrestation, pouvait être considérée comme une traduction devant une autorité judiciaire au sens de la Convention. Elle observe qu’en France les membres du ministère public sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques au sein du Parquet et sous l’autorité du Ministre de la Justice, donc du pouvoir exécutif. La Cour considère que l’indépendance compte, au même titre que l’impartialité, parmi les garanties inhérentes à la notion autonome de « magistrat » au sens de l’article 5 §3. Elle rappelle que les caractéristiques que doit avoir un juge ou un magistrat pour remplir ces conditions excluent notamment qu’il puisse agir par la suite contre le requérant dans la procédure pénale, ce qui est le cas du ministère public.La Cour considère que, du fait de leur statut, les membres du ministère public ne remplissent pas l’exigence d’indépendance à l’égard de l’exécutif et que la requérante n’avait pas été traduite aussitôt après son arrestation devant un magistrat habilité à exercer des fonctions judiciaires. Elle conclut donc à la violation de l’article 5 §3 de la Convention. (ER)

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