France / Délai de comparution devant un juge d’instruction / Absence d’enregistrement des interrogatoires / Droit à la liberté et à la sûreté / Non-violation / Arrêt de la CEDH (Leb 786)

Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 8 novembre dernier, les articles 5 §3, 13 et 14, combiné avec l’article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit à la liberté et à la sûreté, au droit à un recours effectif et à l’interdiction de la discrimination combinée au droit à un procès équitable (Kiril Zlatkov Nikolov c. France, requêtes n°70474/11 et 68038/12). Le requérant, ressortissant bulgare, a été remis aux autorités françaises après son interpellation en Allemagne et placé en rétention. Au bout de 3 jours et 23 heures de détention, il a été présenté à un juge d’instruction qui l’a mis en examen, notamment des chefs de proxénétisme aggravé en bande organisée. En raison de l’exception légale relative aux crimes d’atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation, aux crimes de terrorisme et à ceux relevant de la criminalité organisée, les interrogatoires réalisés dans le cadre de l’instruction n’ont pas été enregistrés. Le requérant a demandé l’annulation de la procédure en raison du caractère excessif du délai entre le placement en rétention et la comparution devant le juge et de l’absence d’enregistrement des interrogatoires. Saisi de plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité relatives à ces griefs, le Conseil constitutionnel a décidé que les textes qui organisent le délai litigieux sont conformes à la Constitution mais a déclaré inconstitutionnelles les dispositions relatives à l’absence d’enregistrement. La déclaration d’inconstitutionnalité ne prenant effet qu’à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, celle-ci n’a pas été prise en compte dans la procédure. Devant la Cour, le requérant se plaignait de ne pas avoir été traduit devant un juge aussitôt après avoir été remis aux autorités françaises, dénonçait une discrimination résultant du fait que, poursuivi pour un crime relevant de la criminalité organisée, ses interrogatoires n’avaient pas été enregistrés, et se plaignait de n’avoir pu exercer un recours contre la violation de son droit à la non-discrimination, ne pouvant bénéficier de la déclaration d’inconstitutionnalité du Conseil constitutionnel. Sur l’allégation de violation de l’article 5 §3 de la Convention, la Cour constate que le délai entre le placement en rétention et la comparution devant le juge est régulier au regard du droit français, n’excède pas le maximum de 4 jours et était justifié en raison des circonstances de l’espèce. S’agissant de l’allégation de violation de l’article 14 combiné à l’article 6 §1 de la Convention, la Cour déclare cette partie de la requête irrecevable, considérant que la discrimination dans la jouissance du droit à un procès équitable que le requérant dénonce ne lui a causé aucun préjudice important. Par conséquent, la Cour considère le grief tiré de la violation de l’article 13 de la Convention infondé. Partant, la Cour conclut à la non-violation des articles 5 §3, 14 et 6 §1 de la Convention. (NH)

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