Ententes / Taux de référence interbancaires / Arrêt du Tribunal (Leb 821)

Saisi d’un recours en annulation par l’entreprise Icap à l’encontre de la décision C(2015) 432 final de la Commission européenne, le Tribunal de l’Union européenne a partiellement accueilli, le 10 novembre dernier, le recours (Icap c. Commission, aff. T-180/15). Dans l’affaire en cause, la Commission a adopté une décision retenant que la requérante, courtier sur le marché des dépôts en espèces de yens japonais, avait participé à la réalisation de 6 infractions à l’article 101 TFUE concernant la manipulation des taux de référence interbancaires LIBOR et TIBOR. En effet, selon la décision, la requérante avait facilité les 6 infractions en cause en fournissant ses estimations des taux JPY LIBOR déterminés par un panel de banques sous la forme d’un bulletin quotidien communiqué aux établissements financiers et ayant une influence significative sur le comportement de ces derniers. En outre, des traders de plusieurs établissements financiers impliqués dans l’entente avaient utilisé les services d’Icap aux fins d’influencer certains membres du panel JPY LIBOR. Saisi dans ce contexte, le Tribunal a examiné 5 des 6 moyens avancés par la requérante. S’agissant, tout d’abord, de l’application de la notion de restriction « par objet » au sens de l’article 101 §1 TFUE, le Tribunal rappelle qu’il y a lieu d’examiner la teneur, les objectifs et le contexte économique et juridique de l’accord. La Commission avait retenu 2 comportements contraires au droit de la concurrence, à savoir, la coordination des soumissions des banques auprès du panel JPY LIBOR et la communication d’informations commercialement sensibles concernant des positions de négociation. La 1ère de ces 2 actions a une incidence sur les paiements dus au titre, à la fois, des parties fixe et variable des contrats de garantie de taux et des swaps de taux d’intérêt conclus par les établissements dans le cadre de leur activité. Le Tribunal considère qu’une telle coordination est destinée à influencer l’étendue des paiements dus par les banques concernées ou devant leur être versés et recèle clairement un objet anticoncurrentiel, élément suffisant pour conclure à une restriction par objet. S’agissant, ensuite, des éléments de preuve avancés par la Commission, le Tribunal juge que la Commission ne dispose pas de preuves sérieuses afin de démontrer la connaissance par la requérante du rôle joué par la banque RBS dans l’infraction UBS/RBS de 2008, d’une part, et qu’elle a mal défini les dates de participation à plusieurs autres infractions, d’autre part. Enfin, s’agissant de la détermination du montant des amendes, le Tribunal relève que la décision attaquée ne fournit pas de précisions quant à la méthode de calcul privilégiée par la Commission mais se contente de donner une assurance générale que les montants de base reflètent la gravité, la durée et la nature de la participation de la requérante aux infractions en cause. Dès lors, la décision ne permet pas aux requérantes, selon le Tribunal, de comprendre le bien-fondé de la méthodologie privilégiée par la Commission, ce qui constitue une insuffisance de motivation insusceptible d’être compensée par la tenue de discussions exploratoires et informelles. Partant, le Tribunal procède à l’annulation partielle de la décision attaquée. (JJ)

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