Ecoutes téléphoniques / Perquisition des locaux professionnels / Droit au procès équitable / Droit au respect de la vie privée / Arrêt de la CEDH (Leb 727)

Saisie d’une requête dirigée contre la Lettonie, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 2 décembre dernier, les articles 6 §1 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit à un procès équitable et au droit au respect de la vie privée et familiale (Taraneks c. Lettonie, requête n°3082/06disponible uniquement en anglais). Le requérant, huissier de justice, a été condamné pour corruption à une peine d’emprisonnement. Sa condamnation était fondée sur des éléments de preuve obtenus sur la base d’enregistrements secrets de conversations téléphoniques entre ce dernier, la victime de la tentative de corruption et l’avocat de celle-ci et après la perquisition de ses locaux professionnels. Arguant l’existence d’une incitation de la part des forces de police et contestant la légalité de la perquisition qui avait été menée dans son cabinet après son arrestation, il alléguait une violation des articles 6 §1 et 8 de la Convention du fait de l’utilisation de preuves récoltées illégalement. S’agissant de l’article 6 §1 de la Convention, la Cour rappelle que l’intérêt public de lutte contre la corruption ne peut justifier l’incitation policière à commettre des infractions. Constatant que le requérant a subi des pressions pour commettre l’infraction, elle affirme qu’il incombait à l’autorité de poursuite de prouver que la personne poursuivie n’avait pas fait l’objet d’une incitation de la part d’un enquêteur. Partant, elle estime que l’absence de diligence des autorités de poursuite pour vérifier l’allégation du requérant constitue une violation de l’article 6 §1 de la Convention. Concernant l’article 8 de la Convention, la Cour admet que les écoutes téléphoniques constituent une ingérence du droit du requérant au respect de sa vie privée. Elle souligne que la base légale avancée pour justifier ces écoutes dispose expressément que ces moyens d’investigation doivent être employés de manière exceptionnelle et relève que l’autorité de poursuite n’avait pas donné d’autorisation écrite aux enquêteurs pour mettre en place des écoutes. Par ailleurs, s’agissant de la perquisition dans les locaux professionnels, la Cour considère qu’il peut y avoir des situations justifiant l’absence d’autorisation judiciaire à condition qu’un contrôle ex post soit effectif. Constatant l’absence de garantie judiciaire ayant protégé les droits du requérant, elle conclut à la violation de l’article 8 de la Convention. (JL)

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