Concurrence / Montants minimaux de rémunération de l’avocat / Arrêt de la Cour (Leb 823)

Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Sofiyski rayonen sad (Bulgarie), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 23 novembre dernier, l’article 101 §1 TFUE et la directive 77/249/CE tendant à faciliter l’exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats (CHEZ Elektro Bulgaria, aff. jtes C-427/16 et C-428/16). Dans l’affaire au principal, la requérante a demandé à ce que l’un de ses clients soit condamné à lui payer une somme au titre d’honoraires d’avocat. Cette somme étant inférieure à celle prévue par la règlementation nationale, la négociation d’une telle somme constitue une infraction disciplinaire en vertu de la loi nationale sur le barreau. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur les points de savoir, notamment si, d’une part, l’article 101 §1 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une règlementation nationale qui ne permet pas à l’avocat et à son client de convenir d’une rémunération d’un montant inférieur au montant minimal fixé par un règlement professionnel et n’autorise pas les juridictions nationales à ordonner le remboursement dudit montant et si, d’autre part, ce même article doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une règlementation en vertu de laquelle les personnes morales et les commerçants indépendants bénéficient d’un remboursement de la rémunération de l’avocat s’ils ont été défendus par un conseiller juridique. S’agissant de la 1ère question, la Cour estime que la règlementation en cause ne contient aucun critère précis susceptible de garantir que les montants minimaux de la rémunération de l’avocat sont équitables et justifiés par le respect de l’intérêt général. Elle considère qu’en l’absence de dispositions susceptibles de garantir que le Conseil supérieur du barreau bulgare se comporte comme un démembrement de la puissance publique œuvrant à des fins d’intérêt général, la fixation de montants minimaux de la rémunération de l’avocat, en empêchant les autres prestataires de services juridiques d’établir des montants de rémunération inférieurs à ces montants minimaux, équivaut à la fixation horizontale de tarifs minimaux imposés. Une telle règlementation ne permet pas aux juridictions nationales d’ordonner le remboursement d’un montant d’honoraires inférieur à ce montant minimal et est, dès lors, susceptible de restreindre le jeu de la concurrence dans le marché intérieur. Au regard du dossier dont elle dispose, la Cour estime qu’elle n’est pas en mesure d’apprécier si une règlementation telle que celle en cause au principal peut être considérée comme nécessaire à la mise en œuvre d’un objectif légitime. Elle juge qu’il incombe à la juridiction de renvoi d’apprécier, au regard du contexte global dans lequel la règlementation a été adoptée ou déploie ses effets si, les règles imposant les restrictions en cause au principal peuvent être regardées comme nécessaires à la mise en œuvre de cet objectif. S’agissant de la 2nde question, la Cour considère qu’une règlementation en vertu de laquelle les personnes morales et les commerçants indépendants bénéficient d’un remboursement de la rémunération de l’avocat s’ils ont été défendus par un conseiller juridique n’impose ou ne favorise pas la conclusion d’ententes et que, partant, l’article 101 §1 TFUE ne s’y oppose pas. En outre, cette règlementation n’entre pas dans le champ d’application de la directive. (JJ)

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