Avocat / Perquisition / Droit au respect de la vie privée et familiale / Arrêt de la CEDH (Leb 734)

Saisie d’une requête dirigée contre la Russie, la Cour européenne des droits de l’homme a, notamment, interprété, le 12 février dernier, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit au respect de la vie privée et familiale (Yuditskaya e.a. c. Russie, requête n°5678/06 – disponible uniquement en anglais). Les requérants, ressortissants russes et avocats, travaillaient dans un cabinet dans lequel des enquêteurs ont procédé à une perquisition, autorisée par un tribunal, dans le cadre d’une enquête pénale. Dans cette affaire, une entreprise d’Etat était suspectée d’avoir versé des pots-de-vin à des huissiers de justice pour authentifier une transaction. Dans ce cadre, un avocat dudit cabinet était soupçonné d’avoir signé des contrats fictifs d’assistance juridique avec l’entreprise d’Etat, afin de couvrir la corruption. Tous les bureaux, y compris ceux des requérants qui n’avaient aucun lien avec l’affaire de corruption et l’entreprise d’Etat en cause, ont été perquisitionnés et l’ensemble des ordinateurs ont été emportés pendant une semaine. Les requérants se plaignaient que la perquisition dans leurs bureaux et la saisie de leurs ordinateurs contenant des informations protégées par le secret professionnel avaient violé leurs droits découlant de l’article 8 de la Convention. La Cour constate que la perquisition a été autorisée par une décision judiciaire et visait à découvrir des preuves dans le cadre d’une affaire pénale. Elle considère, dès lors, que la mesure poursuivait un but légitime de prévention de la criminalité. Toutefois, la Cour relève, d’une part, que le mandat de perquisition a été formulé en termes très larges, donnant aux enquêteurs un pouvoir discrétionnaire et illimité dans la conduite de la perquisition. D’autre part, la présence de 2 témoins, sans aucune qualification juridique et donc incapables d’identifier des documents couverts par le secret professionnel, ne pouvait pas être considérée comme une garantie suffisante. En conséquence, la Cour considère que la perquisition effectuée en l’absence de soupçon raisonnable et de garanties contre la violation du secret professionnel ainsi que la saisie de leurs ordinateurs allaient au-delà de ce qui était nécessaire dans une société démocratique pour atteindre l’objectif légitime poursuivi. Partant, elle conclut à la violation de l’article 8 de la Convention. (ES)

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