Avocat / Clauses abusives / Notion de « consommateur » / Arrêt de la Cour (Leb 750)

Saisie d’un renvoi préjudiciel par la Judecătoria Oradea (Roumanie), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 3 septembre dernier, la directive 93/13/CE concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (Costea, aff. C-110/14). Dans le litige au principal, un avocat a conclu un contrat de crédit avec une banque. Le remboursement de ce prêt a été garanti par une hypothèque constituée sur un immeuble appartenant à son cabinet d’avocat. Ledit avocat a introduit devant le tribunal d’instance compétent une requête visant, notamment, à faire constater le caractère abusif d’une clause contractuelle du contrat de crédit. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si l’article 2, sous b), de la directive, qui définit la notion de « consommateur », doit être interprété en ce sens qu’une personne physique, exerçant la profession d’avocat, qui conclut un contrat de crédit avec une banque, sans que le but du crédit soit précisé dans ce contrat, peut être considérée comme un « consommateur », au sens de cette disposition. La Cour rappelle, tout d’abord, que les règles concernant les clauses abusives doivent s’appliquer à tout contrat conclu entre un « consommateur » et un « professionnel » et que l’article 2, sous b), de la directive définit le « consommateur » comme toute personne physique qui, dans les contrats relevant de ladite directive, agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle. Elle précise que pour apprécier la qualité de consommateur ou de professionnel, la juridiction nationale saisie d’un litige doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce et, notamment, de la nature du bien ou du service faisant l’objet du contrat considéré, susceptibles de démontrer à quelle fin ce bien ou ce service est acquis. S’agissant des avocats, la Cour estime qu’un avocat qui conclut, avec une personne physique ou morale agissant dans le cadre de son activité professionnelle, un contrat qui, faute, notamment, d’avoir trait à l’activité de son cabinet, n’est pas lié à l’exercice de la profession d’avocat, se trouve, à l’égard de cette personne, dans une situation d’infériorité à l’égard du professionnel, en ce qui concerne tant le pouvoir de négociation que le niveau d’information. Dans un tel cas, la Cour indique que, quand bien même il serait considéré qu’un avocat dispose d’un niveau élevé de compétences techniques, cela ne permet pas de présumer qu’il n’est pas une partie faible en relation avec un professionnel. Partant, la Cour estime que l’article 2, sous b), de la directive doit être interprété en ce sens qu’une personne physique exerçant la profession d’avocat, qui conclut un contrat de crédit avec une banque, sans que le but du crédit soit précisé dans ce contrat, peut être considérée comme un « consommateur », au sens de cette disposition, lorsque ledit contrat n’est pas lié à l’activité professionnelle de cet avocat. La circonstance que la créance née du même contrat est garantie par un cautionnement hypothécaire contracté par cette personne en qualité de représentant de son cabinet d’avocat et portant sur des biens destinés à l’exercice de l’activité professionnelle de ladite personne, tels qu’un immeuble appartenant à ce cabinet, n’est pas pertinente à cet égard. (AB)

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