Aides d’Etat / Créance fiscale / Restructuration / Arrêt du Tribunal (Leb 826)

Saisi d’un recours en annulation à l’encontre de la décision 2016/154/UE de la Commission européenne concernant l’aide d’Etat SA.13869, le Tribunal de l’Union européenne a rejeté, le 16 janvier dernier, le recours (EDF et France c. Commission, aff.T-747/15). Dans l’affaire en cause, la France a renoncé, dans le cadre d’une opération de restructuration du bilan et d’augmentation du capital d’EDF, à une créance fiscale évaluée à 889 millions d’euros d’impôt sur les sociétés. Par une décision de 2003, la Commission a déclaré la mesure d’aide incompatible avec le marché intérieur et exigé la récupération de cette aide. Par un arrêt de 2009, confirmé par un arrêt de la Cour de 2012 (EDF c. Commission, T-156/04 ; Commission c. EDF, C-124/10 P), le Tribunal a annulé les articles 3 et 4 de cette décision, au motif que la Commission ne pouvait pas refuser, à l’occasion de son adoption, d’examiner si l’Etat français s’était comporté comme un investisseur privé en économie de marché. A la suite de ces arrêts, la Commission a adopté la décision attaquée, par laquelle elle examine l’applicabilité et l’application du critère de l’investisseur privé à la mesure en cause. Elle en a conclu que le principe n’était pas applicable en raison du fait que la mesure ressortait à la qualité de puissance publique de la France, qu’il n’est pas établi qu’un actionnaire privé aurait apporté, à des conditions similaires, un montant égal à l’impôt dû dans une entreprise se trouvant dans une situation comparable et que la mesure d’aide était incompatible avec le marché intérieur. Saisi dans ce contexte, le Tribunal a examiné les 4 moyens avancés à titre principal par EDF. S’agissant de l’applicabilité du critère de l’investisseur privé, le Tribunal rejette les arguments relatifs à la violation du devoir de diligence par la Commission. Il considère que la Commission a estimé à bon droit que la mesure litigieuse n’est pas une mesure de recapitalisation d’EDF mais la renonciation à percevoir l’impôt sur les droits du concédant. De plus, selon le Tribunal, les arrêts de 2009 et 2012 n’ont pas préjugé de l’applicabilité dudit critère. Le Tribunal considère qu’il convient de distinguer l’Etat actionnaire de l’Etat puissance publique, l’applicabilité du critère dépendant de ce que l’avantage soit accordé par l’Etat en tant qu’actionnaire. Il juge que la Commission a procédé à l’appréciation de l’ensemble des éléments mis à sa disposition et que, s’il n’est pas exclu que des considérations de puissance publique puissent coexister avec des considérations d’actionnaire, celles-ci ne sauraient avoir une incidence sur la question de savoir si la mesure aurait été adoptée dans les conditions normales du marché par un investisseur privé. Il incombait à la Commission d’examiner, afin de déterminer si le critère était effectivement applicable, si la France avait avancé des éléments faisant apparaître clairement qu’elle avait pris, sur le fondement d’une évaluation économique préalable requise de rentabilité, la décision de procéder à un investissement dans EDF. Le Tribunal juge que c’est au terme d’une appréciation globale et après avoir examiné chacun des éléments susceptibles d’être pertinents que la Commission a conclu, en l’absence de considérations d’actionnaire, que la mesure ne constituait pas un investissement de la part de la France. Partant, le Tribunal valide l’analyse de la Commission sur l’absence d’applicabilité du critère. Elle rejette les 3 autres moyens principaux et, partant, le recours dans son intégralité. (JJ)

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