Contrat de prêt hypothécaire / Clauses abusives / Arrêt de la Cour (Leb 824)

Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Juzgado de Primera Instancia de Jerez de la Frontera (Espagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 7 décembre dernier, les articles 6 §1 et 7 §1 de la directive 93/13/CEE concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (Banco Santander, aff. C-598/15). Dans l’affaire au principal, un consommateur a conclu avec la requérante, une institution bancaire, un contrat de prêt pour l’achat d’un logement assorti d’une garantie hypothécaire. Sur l’initiative de celle-ci, la procédure de mise en vente extrajudiciaire a été engagée par l’adjudication du logement hypothéqué au créancier. Sur le fondement de l’inscription au registre immobilier, la requérante a introduit une demande en vue de l’obtention d’une décision ordonnant la mise en possession du logement en cause à son profit et l’expulsion du consommateur. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si les articles 6 §1 et 7 §1 de la directive doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation nationale telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle le juge national est tenu d’accorder la pleine possession d’un bien immeuble à son acquéreur sans que ni la procédure extrajudiciaire d’exécution de la garantie hypothécaire ni la procédure régissant la demande dont le juge est saisi ne permettent au propriétaire initial d’exciper de la présence d’une clause abusive au sein du contrat qui a fait l’objet de l’exécution extrajudiciaire. La Cour rappelle, tout d’abord, que le système de protection des consommateurs mis en œuvre par la directive repose sur l’idée que le consommateur se trouve dans une situation d’infériorité à l’égard du professionnel en ce qui concerne le pouvoir de négociation et le niveau d’information. Il ressort, ensuite, que l’objet de l’action en cause vise à garantir la protection des droits réels enregistrés au registre immobilier. Ainsi, une telle procédure intervient postérieurement au transfert de la propriété d’un bien immeuble et est diligentée par le nouveau propriétaire dudit bien. Dès lors, selon la Cour, le litige au principal ne concerne pas la procédure d’exécution mais la protection des droits réels liés à la propriété légalement acquise au terme d’une vente par adjudication. Dans ce contexte, la Cour estime que permettre au débiteur ayant consenti une hypothèque d’opposer à l’acquéreur des exceptions tirées du contrat de prêt hypothécaire risquerait d’affecter la sécurité juridique de rapports de propriété établis. La Cour considère, enfin, que les dispositions de la directive ne sauraient être utilement invoquées en l’absence de tout indice concordant quant à la présence éventuelle d’une clause potentiellement abusive dans le contrat de prêt hypothécaire. Elle juge que c’est dans le cadre de la procédure d’exécution hypothécaire que le juge aurait pu procéder à l’examen du caractère éventuellement abusif de clauses figurant dans ledit contrat. Partant, les articles 6 §1 et 7 §1 de la directive ne sont pas applicables à une procédure telle que celle au principal. (JJ)

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