Les droits et les libertés garanties par la Convention ne s’appliquent pas aux actes commis par des ressortissants d’un Etat Partie sur le territoire et à l’encontre de ressortissants d’un Etat tiers en l’absence de « lien de proximité » (22 octobre)
Arrêt Abdulaal Naser e.a. c. Danemark, requête n°46571/22
Les requérants sont des ressortissants irakiens alléguant notamment avoir subi des traitements contraires à l’article 3 de la Convention lors de leur détention par des soldats de différentes forces armées déployées en Irak dans le cadre d’une coalition internationale sous mandat des Nations Unies. Ils soutiennent avoir fait l’objet d’actes de torture de la part de soldats irakiens et britanniques placés sous le commandement de soldats danois, lesquels auraient participé à leur arrestation, leur fouille, leur interrogatoire puis leur détention, en parfaite connaissance des traitements qui leur étaient infligés à cette occasion. D’après les requérants, les forces danoises se sont temporairement substituées au gouvernement irakien dans l’exercice de certaines prérogatives de puissance publique, créant à leur égard un « lien de proximité » permettant de leur imputer les actes commis, dans la mesure où ils avaient connaissance ou aurait dû connaître l’existence de tels actes. La Cour EDH rappelle que, conformément à l’article 1 de la Convention, seules les personnes ressortissantes d’un Etat Partie à la Convention peuvent bénéficier des droits et des libertés prévues par celle-ci. Cela implique que la compétence d’un Etat partie ne s’exerce que sur son territoire à l’exception des cas où, dans le cadre d’une opération militaire extérieure, l’Etat Partie exerce, directement ou via des forces locales subordonnées, une autorité ou un contrôle effectif sur un territoire étranger ou un individu. La Cour EDH constate, qu’eu égard aux modalités pratiques de la coopération des forces armées irakiennes et danoises, du champ matériel du mandat conféré à ces dernières et des tâches effectivement exercées, les forces armées danoises étaient chargées d’apporter une assistance aux forces irakiennes pour le maintien de la sécurité et d’assurer la formation et l’entraînement des forces de police. Ainsi, elles ne pouvaient être réputées comme ayant exercé des prérogatives étatiques du gouvernement souverain ou exercé un contrôle sur les requérants, soit par la force, la contrainte physique, leur arrestation ou par tout autre acte violent permettant d’établir un « lien de proximité » avec ceux-ci. Partant, la Cour considère que les griefs fondés sur la violation de l’article 3 ne sont pas recevables. (BM)