Garde à vue / Assistance d’un interprète / Droit à un procès équitable / Arrêt de la CEDH (Leb 724)

Saisie d’une requête dirigée contre la Turquie, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 14 octobre dernier, l’article 6 §1 et §3, sous e), de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit à un procès équitable et à l’assistance d’un interprète (Baytar c. Turquie, requête n°45440/04). La requérante, ressortissante turque, a été placée en garde à vue puis condamnée à une peine de prison ferme pour appartenance et aide et assistance à une organisation illégale armée. Invoquant l’article 6 §1 et §3, sous e), de la Convention, la requérante alléguait qu’elle n’avait pas pu bénéficier de l’assistance d’un interprète pendant sa garde à vue, ce qui rendait les preuves obtenues pendant celle-ci irrecevables. La Cour rappelle, tout d’abord, qu’un accusé ne maîtrisant pas la langue employée pendant la procédure à son encontre a droit aux services gratuits d’un interprète afin de comprendre ce qu’on lui reproche et de se défendre, et ce dès le stade de l’enquête. Elle souligne, en outre, que la décision par la personne gardée à vue de faire usage ou de renoncer à ses droits ne peut être prise que si celle-ci comprend de manière claire les faits qui lui sont reprochés afin de pouvoir mesurer les enjeux de la procédure. La Cour note qu’il n’est pas contesté que le niveau de connaissance de la langue turque de la requérante était insuffisant. En effet, cette dernière a pu bénéficier de l’assistance d’un interprète lors de son audition par le magistrat chargé de statuer sur son placement en détention, mais pas lors de son interrogatoire en garde à vue. La Cour estime que la requérante n’a pas été mise en situation de mesurer pleinement les conséquences de sa renonciation à son droit de garder le silence et à bénéficier de l’assistance d’un avocat, n’ayant pas disposé de la possibilité de se faire traduire les questions et d’avoir une connaissance aussi précise que possible des faits qui lui étaient reprochés. Partant, la Cour conclut à la violation de l’article 6 §3, sous e), combiné avec l’article 6 §1 de la Convention. (MG)

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