Brexit

L’ESSENTIEL. Le Royaume-Uni a quitté l’Union européenne par la signature d’un accord de retrait le 1er février 2020 comprenant notamment un protocole sur l’Irlande et l’Irlande du Nord. Cet accord de retrait a ouvert une période transition, jusqu’au 31 décembre 2020, durant laquelle le droit de l’Union européenne restait applicable au Royaume-Uni. Il prévoyait également un délai de négociation jusqu’au 31 décembre 2020 pour la conclusion d’un traité sur les relations futures entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. A défaut, le Brexit aurait lieu sans traité, le fameux « hard Brexit ».

L’Union européenne et le Royaume-Uni ont finalement signé un accord de coopération et de commerce le 24 décembre 2020.

La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne entraine de nombreuses conséquences, telles que la sortie du marché intérieur et la perte des libertés de circulation pour les entreprises comme pour les citoyens britanniques et européens.

Objet de l’accord. L’accord de coopération et de commerce a pour objet de « jeter les bases d’une relation large entre les Parties, dans un espace de prospérité et de bon voisinage caractérisé par des relations étroites et pacifiques fondées sur la coopération, dans le respect de l’autonomie et de la souveraineté des Parties » (art. COMPROV.1).

Contenu de l’accord. En pratique, 4 textes organisent la relation entre le Royaume-Uni et l’Union :

  1. l’accord commercial et de coopération (1246 pages), couvrant les éléments relatifs aux services juridiques mais aussi les échanges de biens et de services et certains domaines d’intérêt pour l’Union, tels que l’investissement, la concurrence, les aides d’État, la transparence fiscale, le transport aérien et routier, l’énergie et la durabilité, la pêche, la protection des données et la coordination en matière de sécurité sociale.
  2. un accord sur le nucléaire civil (18 pages)
  3. un accord sur l’échange d’information pour la sécurité intérieure (8 pages)
  4. une quinzaine de déclarations adossées aux accords (26 pages)

Marchandises. Aucun quotas ou droits de douanes ne seront appliqués. Toutefois, des contrôles douaniers, sanitaires et phytosanitaires seront instaurés aux frontières. L’Union européenne et le Royaume-Uni deviennent ainsi une « zone de libre-échange », au sens du droit de l’Organisation mondiale du commerce.

Services. L’accord contient des dispositions relatives aux services qui demeurent pour l’essentiel soumis aux règles de l’Organisation mondiale du commerce. La conséquence principale du nouvel accord est l’abandon du principe de la « règle d’origine » qui prévaut en matière de prestations de services au sein de l’Union européenne. Dorénavant, la règle applicable est celle de l’Etat d’accueil.

Si certains secteurs comme le secteur culturel connaissent de fortes restrictions de déplacement, d’autres secteurs bénéficient de dispositions spécifiques facilitant la fourniture de leurs services entre les Parties.

Personnes.
→ S’agissant des citoyens : l’accord commercial n’a pas vocation à gouverner leur situation. L’accord de retrait du 1er février 2020 autorise des séjours de maximum 90 jours tous les 180 jours.

→ S’agissant des travailleurs : l’accord ne permet une liberté de circulation que dans certains cas, expressément énumérés dans le Chapitre 4 : Entrée et séjour temporaire de personnes physiques à des fins professionnelles et aux articles SERVIN 4.1 à 4.6 :

    • Pour les visiteurs se déplaçant pour affaires en vue d’un établissement ;
    • Pour les fournisseurs de services contractuels ;
    • Pour les professionnels indépendants ;
    • Pour les personnes faisant l’objet d’un transfert temporaire intragroupe.

Maintien d’une concurrence ouverte et loyale et développement durable. Les Parties s’engagent à ne pas revoir à la baisse l’ensemble des législations et standards sociaux, environnementaux et climatiques en place le 31 décembre 2020 pour le maintien d’une concurrence ouverte et loyale (aussi connu sous le terme anglais de « level playing field »).

Organe de résolution des conflits. Afin d’anticiper les différends éventuels, les Parties ont institué un organe chargé de leur résolution : le Conseil de partenariat. Il est co-dirigé par un commissaire de l’Union européenne et un ministre britannique.

Le mécanisme de type intergouvernemental est uniquement ouvert aux représentants du Royaume-Uni et de l’Union européenne.

Plusieurs procédures existent, dont une notamment spécifique à la pêche. Pour l’essentiel, chacune repose sur des phases de discussions préalables, après quoi le recours à un arbitrage est prévu et, éventuellement, des sanctions telles que la suspension par une Partie de ses engagements pour une durée délimitée.

Focus sur les services juridiques et l’exercice de la profession d’avocat

Les services juridiques font partie des rares services à disposer d’une section dédiée spécifiquement au sein de l’accord (art. SERVIN.5.47 à SERVIN.5.50). Cette inscription constitue en soi une première dans l’historique des accords de commerce signés par l’Union européenne. En pratique cependant, il ne s’agit que d’un simple regroupement et d’une réécriture clarificatrice des articles relatifs aux services juridiques qui existaient dans des accords de commerce similaires.

→ L’accord prévoit le droit pour les avocats de fournir, sous leur titre d’origine, des services sur le territoire de l’autre Partie art. SERVIN.5.49). Ce droit est encadré :

  • D’une part, il est limité aux prestations de conseil juridique, d’arbitrage, de conciliation et de médiations juridiques en droit de la juridiction d’origine et en droit international public, à l’exclusion du droit de l’Union européenne.
  • D’autre part, il ne vaut que dans le cadre de certaines mobilités prévues à l’article SERVIN.4.4. Sur un plan pratique, cela signifie que les fournitures de services sont limitées à une période maximale de 12 mois et à des conditions d’expérience minimale de 6 années pour tout avocat souhaitant exercer ce droit.

→ L’accord ne prévoit pas l’accès des avocats d’une Partie aux juridictions de l’autre Partie.
→ L’accord autorise l’ouverture de succursale sur le territoire de l’autre Partie qui serviront de support administratif aux avocats venant fournir des services de manière temporaire.
→ Les Etats membres restent libres d’exercer certaines réserves, telles que des conditions d’enregistrement préalable de l’avocat auprès des autorités de l’autre Partie. La France a formulé plusieurs réserves. Elle exige notamment que les succursales prennent la forme d’une société de droit français.

Il importe de souligner que l’accord est conçu comme un socle minimal. Les Etats membres ont toute latitude pour aller plus loin et accorder davantage de droits que ceux prévus par l’accord, à condition toutefois de respecter le droit de l’Union européenne en vigueur (acquis) et de ne pas adopter de mesure discriminatoire à l’égard des avocats ressortissants d’autres Etats tiers (principe de la nation la plus favorisée).


Contacts utiles

– Au niveau européen :

  • Le Conseil des Barreaux européen (CCBE) pourra vous mettre en relation avec les instances ordinales compétentes pour chacun des Etats qui en sont membre (le Royaume-Uni et les 27 Etats de l’Union européenne y adhèrent)
  • L’équipe Brexit de la Délégation des Barreaux de France est à votre service pour vous aiguiller dans vos démarches.

– En France.
Les avocats originaires du Royaume-Uni souhaitant fournir des services en France peuvent se rapprocher du Conseil National des Barreaux afin d’obtenir des informations sur le statut français de consultant juridique étranger.


Dates clés.

29 Mars 2017Activation de l’article 50 du TUE
Le Royaume-Uni déclenche la procédure de son départ de l’UE par le biais de l’article 50 TUE, pour un départ le 31 mars 2019. Le délai de négociation est de 2 ans, sauf si le Conseil européen et l’État membre, décident de proroger ce délai.

Avril / Mai 2017Ouverture des négociations
Le Conseil européen composé des dirigeants de tous les Etats membres de l’UE (Royaume-Uni excepté) a établi les lignes directrices des négociations. Il adopte également :
– une décision autorisant l’ouverture de négociations avec le Royaume-Uni en désignant la Commission européenne comme négociateur de l’Union, représentée par M. Michel Barnier, négociateur en chef.
– le premier ensemble de directives de négociation pour une position harmonisée au sein de l’Union aux fins des négociations.

25 novembre 2018Premier accord de retrait
Les Parties parviennent à un premier accord de retrait. Les députés britanniques rejettent à 3 reprises le texte défendu par la Première Ministre Theresa May. Le Brexit est reporté au 31 octobre 2019.

17 octobre 2019Deuxième accord de retrait
Les Parties conviennent d’un nouvel accord de retrait du Royaume-Uni. Ils repoussent une dernière fois le Brexit au 31 janvier 2020.

Janvier 2020 – L’accord est validé par le Conseil européen, puis approuvé par les députés britanniques.

1er février 2020Sortie du Royaume-Uni
Brexit. Le Royaume-Uni sort officiellement de l’Union européenne. Une période de transition démarre. Elle doit se terminer le 31 décembre 2020. Durant cette période, le Royaume-Uni continue d’appliquer les règles du droit de l’Union, de bénéficier des libertés de circulation et de l’accès au marché intérieur mais ne participe plus à la prise de décisions au sein de l’Union. Les députés britanniques quittent le Parlement européen.

Conséquences pour les avocats et les cabinets d’avocats. Durant cette période les avocats conservent le bénéfice de leur liberté de circulation entre l’UE et le Royaume-Uni (notamment celui des 2 directives établissement et prestation de services). Les cabinets d’avocats peuvent maintenir leur présence sous leur forme sociale ante-Brexit..

Février-Décembre 2020Négociations entre l’UE et le Royaume-Uni sur les relations futures
Les parties disposaient d’un délai strict de 11 mois, à savoir jusqu’au 31 décembre 2020, pour conclure un accord de coopération post-Brexit, le Royaume-Uni ayant manifesté sa volonté de ne pas étendre cette période. Le Conseil mandate à nouveau la Commission européenne pour mener ces négociations.

Mesures nationales concernant les avocats en anticipation d’un « hard Brexit » sans accord sur les services juridiques. Craignant un accord qui ne concernerait pas, ou peu, la profession d’avocat, plusieurs gouvernements préparent des mesures ayant pour effet de permettre aux structures britanniques implantées sur leur territoire de pouvoir maintenir leur présence. En France, il s’agit de l’ordonnance n° 2020-1596 du 16 décembre 2020.

24 décembre 2020Signature de l’accord de coopération
Un accord commercial et de coopération est finalement trouvé quelques jours avant la date limite, 4 ans et demi après le référendum ayant initié le processus du Brexit.

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